Hier le Premier ministre a prononcé son discours devant les députés en quête de leur confiance.
Dans un hémicycle bien rempli, le nouveau chef du gouvernement a vécu son baptême du feu en prononçant pendant 47 minutes un discours sur la politique générale très attendu.
Il a demandé aux députés « le cœur battant pour la France » de lui accorder leur confiance et l’a gagnée avec 306 voix contre 239 et 26 abstentions dont 11 socialistes selon les résultats annoncés peu après 19h.
Il s’est dit fier d’être de nationalité française et de vivre dans u pays où des citoyens nés à l’étranger ont la possibilité d’accéder aux plus hautes fonctions de l’État.
Votes et mesures annoncés
Il obtient la majorité absolue (577 membres de l’Assemblée nationale) mais il n’a pas fait le plein des voix des 3 groupes de la majorité (socialiste, écologistes et radicaux de gauche).
Ainsi 11 députés socialistes et 6 écologistes se sont abstenus de voter leur confiance à Manuel Valls.
Dans son discours, le Premier ministre a assurer « vouloir travailler avec la majorité parlementaire sur la base d’un contrat qui nous engage mutuellement ».
Après avoir promis « vérité » et « efficacité », il préconise de réduire de plus de la moitié le nombre de régions dans l’hexagone avec une nouvelle carte des régions le 1er janvier 2017, il propose aussi de supprimer les conseils départementaux d’ici 2021.
Il propose un assouplissement de la mise en œuvre de la réforme scolaire.
Très attendu sur le chapitre économique, il annonce un calendrier budgétaire précis notamment en ce qui concerne l’allégement des cotisations sur les bas salaires. Il assure qu’à partir de 2015, les cotisations patronales à l’Urssaf seront « entièrement supprimées » sur le Smic ainsi que pour les cotisations familiales qui seront abaissés pour 2016 « jusqu’à 3 fois et demi le Smic » comme celles des travailleurs indépendants.
Au total le coût du travail devrait baisser de 30 milliards en 2016.
Vers 2017, la fiscalité pesant sur les ménages modestes devrait être revu à la baisse avec un effort de 5 milliards.
Il a confirmé l’objectif de réduction de la dette française, en dépit des voix qui s’élèvent à gauche pour récuser la rigueur budgétaire.
Il renouvelle la promesse de diminuer de 50 % la part du nucléaire d’ici 2025 et précise que le texte sur la transition énergétique sera présenté avant l’été.
Pour arriver au 50 milliards d’euros d’économies d’ici à la fin du quinquennat, l’État sera mis à contribution de 19 milliards d’euros, l’assurance maladie à 10 milliards d’euros et les collectivités aussi à hauteur de 10 milliards d’euros mais le premier ministre est resté vague sur les 10 milliards restant.
Il déclare :
« je ne suis pas pour l’austérité, pas pour la remise en cause de notre modèle. »
Réactions des politiciens
Côté négatif :
Le député UDI, Christophe Lagarde a noté :
« il n’ y a pas de changement. Il a annoncé beaucoup de dépenses et je ne sais pas où il économise les 50 milliards. »
Le président du groupe UDI-UC au sénat, François Zocchetto déclare :
« Manuel Valls, au nom du Parti socialiste, vient de découvrir que pour diminuer le chômage, il faut d’abord créer de la croissance, de la confiance et stabiliser le coût du travail, qu’il faut par ailleurs préserver la famille et pacifier notre société…
Un tel discours pourrait apparaître comme la reprise de l’analyse des centristes UDI-UC, s’il était soutenu par des propositions claires sur la TVA sociale ou la suppression des 35h00 dans la fonction publique ; mais il n’en est rien. À titre personnel, le Premier ministre serait manifestement plus à l’aise à l’UDI qu’au PS.
Malheureusement, entouré d’un gouvernement à la composition ambiguë, Manuel Valls n’a pas encore démontré qu’il n’était plus l’otage des gardiens du temple socialiste. »
Au sénateur UDI-UC, Jean Arthuis constate :
« le discours de politique générale de Manuel Valls fait le choix du déficit et de l’endettement publics. Les mesures annoncées ne répondent ni aux exigence de compétitivité qui conditionnent l’inversion de la courbe du chômage, ni à la réduction des dépenses publiques…
Les réformes, c’est maintenant ! Elles ne peuvent pas attendre 2021 ! Nous avons besoin de mesures structurantes sans délais. Il n’y a pas de croissance sans confiance. Ce discours ne conforte ni la confiance, ni la croissance. Il multiplie les questions sans réponses. »
Le parti EELV publie un communiqué, ci-dessous un extrait.
« Beaucoup de communication mais peu de changement : ni changement de dimension, ni changement de cap ! Tout ça pour ça ?
Le discours de politique générale a confirmé dans ses grands axes le pacte de responsabilité déjà annoncé avant la défaite de la gauche aux municipales : des économies massives et dans tous les domaines pour financer des baisses de cotisations dont nul ne peut dire si elles créeront réellement de l’emploi ou seulement de la dette…
Les écologistes regrettent par ailleurs l’absence de la dimension européenne dans le Discours du Premier ministre…
Ils notent également la confirmation de la réduction de la part du nucléaire dans le mix énergétique mais déplorent l’absence d’objectifs de développement des énergies renouvelables ou d’efficience énergétique.
Ils réaffirment que ces orientations générales politiques économiques, sociales, environnementales et budgétaires ne répondent pas à la profondeur des crises sociales et environnementales. Le couple exécutif persiste à ne pas prendre la mesure du changement nécessaire. »
Le NPA (Nouveau Parti Anticapitaliste) a lui aussi publié un communiqué dont voici un extrait.
« Sans surprise, la confiance que Valls a demandée à l’Assemblée nationale est fondée sur la poursuite d’une politique faite de cadeau au patronat, de destruction de la protection sociale, de coupes claires dans les dépenses publiques c’est-à-dire dans les budgets sociaux.
Il prétend avoir entendu les silences des Français mais a surtout attendu les exigences patronales…
Après plusieurs promesses sans contenu envers les écologistes, les syndicats d’enseignants, sur le logement et l’annonce de nouveaux reniements sur la réforme pénale, la famille, l’immigration, le droit d’asile et la fin de vie, Valls a assumé la politique coloniale au Mali, en Centrafrique et dénié toute implication de la France dans le génocide au Rwanda avec une morgue insultante pour la population rwandaise.
Pour conclure, l’ex-ministre de la répression des immigrés et des Roms n’a laissé planer aucune ambiguïté sur la poursuite de sa politique répressive. »
Dans le Finistère, Christian Troadec, maire de Carhaix et porte-parole des Bonnets rouges s’est exprimé :
« Manuel Valls nous promet une hypothétique réforme avec moitié moins de régions en 2014 et la disparition des conseils généraux en …2021.
Il est grand temps que les régions deviennent la collectivité de référence et qu’en Bretagne les départements (y compris la Loire-Atlantique) se fondent dans une Assemblée de Bretagne disposant du budget ou des pouvoirs adéquats pour répondre aux défis que rencontre aujourd’hui la Bretagne.
Oui, M.Valls, nous sommes pour une réorganisation des collectivités. Et en Bretagne, ça passe tout simplement par la réunification des cinq départements bretons et la création d’une Assemblée de Bretagne. »
Eric Doligé, sénateur UMP s’exprime en ce qui concerne les régions :
« divisée par deux le nombre des régions va tout à fait dans le sens de la proposition que j’avais faite au Premier ministre après quelques semaines. Le problème est qu’on va élire 22 présidents en 2015 et que deux ans après la moitié d’entre eux va être supprimée.
Ne faudrait-il pas réduire le nombre des régions avant les élections ? Pour les départements la suppression à 2021 n’a pas de sens.
C’est un enterrement de première classe. S’il y avait une volonté réelle, il fallait annoncer la suppression avant fin 2015 en même temps que la réductions des régions à la même date. Nous sommes dans une action de communication démagogique. »
Le président des députés UMP Christian Jacob a estimé que :
« l’autorité de Manuel Valls est déjà profondément atteinte par le rétrécissement de sa majorité.
Le chef de file des députés Front de Gauche André Chassaigne a reproché au Premier ministre de n’avoir apporté « aucune réponse à la souffrance sociale. »
Hors de l’assemblée, la présidente du Front National Marine Le Pen a jugé que « le gouvernement envoie la France dans le mur. »
Du côté positif :
Jean-Paul Huchon, président PS de la région Île-de-France diffuse lui aussi un communiqué, voici un extrait.
« Ce qui m’a frappé, c’est le réalisme et la lucidité du Premier ministre devant la situation du pays. Ce qui m’a frappé également, c’est la capacité d’entraînement dont il a fait montre pour lui faire face et la confiance qu’il a mise dans le dialogue avec le Parlement…
Je salue également la décision de doter les Régions de compétences claires et renforcées comme je l’appelais de mes vœux et je prends acte de la possibilité donnée aux collectivités de s’agrandir.
La réduction du nombre de Régions par Deux ? Allons-y, dès lors que les régions disposent des moyens pour améliorer le quotidien de nos concitoyens et le développement économique de leur territoire. L’Île-de-France saura être au côté du gouvernement pour formuler des propositions comme elle a toujours su le faire. »
Anne Hidalgo, maire PS de Paris témoigne son soutien au gouvernement.
« Manuel Valls a eu raison de proposer une réorganisation territoriale ambitieuse autour des régions et des intercommunalités. Paris prendra sa part dans cette simplification administrative à travers la Métropole qui verra le jour à l’horizon 2016…
Parce que Paris s’est déjà depuis plusieurs années engagée plus qu’aucune autre collectivité sur la voie de la solidarité territoriale, je veillerai personnellement à ce que les efforts supplémentaires ne contreviennent pas aux intérêts essentiels des parisiens.
Je m’assurerai de la juste répartition des efforts demandés en prenant en compte la situation objective de chaque territoire. »
Harlem Désir, premier secrétaire du PS a salué les « réformes audacieuses, courageuses et justes qui seront conduites d’ici à2017 et qui transformeront profondément notre pays. »
Un autre sénateur Ps, François Patriat déclare :
« le gouvernement montre qu’il a entendu le message des Français et qu’il souhaite y répondre par la mise en oeuvre de mesures fortes. Sur l’économie, la politique de l’offre se trouve renforcée par le biais de mesures concrètes (allègement du coût du travail et gain du pouvoir d’achat des bas salaires notamment) permettant de redonner confiance à tous les entrepreneurs et d’apporter des signes tangibles en faveur de la croissance et de l’emploi.
Concernant la réforme des collectivités, je suis en plein accord avec les dispositions majeures proposées par le premier Ministre : suppression de la clause de compétence générale, renforcement de l’intercommunalité, rapprochement des régions et réforme des conseils départementaux en 2021 permettront en effet de supprimer les doublons et d’alléger les charges de structure de façon significative.
Je m’engage d’ailleurs à entamer les discussions avec la présidente du Conseil régional de Franche-Comté afin de mettre en place la mutualisation des moyens et des compétences majeures de nos deux régions : transports, culture, formation professionnelle, etc. L’effort demandé aux collectivités en accompagnement de celui demandé à l’État devra porter sur le fonctionnement et en aucun cas sur l’investissement. »
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