Pour y voir un peu plus clair, faisons le point sur cette nouvelle réforme du parti socialiste qui concerne le collège. Ce mardi, les enseignants vont entrer en grève, Actu-mag va tenter de répondre à cette question : pourquoi une nouvelle confrontation entre les professeurs et le gouvernement ? Pour y répondre nous allons regarder de près les opinions de différents acteur : gouvernement et opposition, syndicat, professeurs et parents d’élèves.
Ce que prévoit la réforme des collèges
Les informations reprises ici proviennent d’un article de FR3 (lien ci-dessus) décryptant point par point les nouveautés engendrées par cette réforme dans le système complexe de l’éducation nationale. Premier élément, l’ajout de la notion d’Autonomie, les collèges devront fixer 20% de l’emploi du temps (4h par semaine) à l’accompagnement personnalisé (3h par semaine en 6e et 1 h par semaine au minimum de la 5e à la 3e) et l’enseignement de pratiques interdisciplinaires (cours adaptés à partir de thèmes imposés aux professeurs) sans perturber les horaires consacrées à l’étude des autres disciplines.
L’interdisciplinarité est prise très au sérieux, les professeurs devront mener des projets favorisant le travail de groupe qui seront inscrits au programme et compteront dans le brevet. Huit grands thèmes d’EPI (Enseignements Pratiques Interdisciplinaires) ont été choisis par le gouvernement qui lance donc de nouvelles matières en quelques sortes qui devront être enseignées par les professeurs actuellement en poste : développement durable, sciences et société, corps, santé et sécurité, information, communication, citoyenneté, culture et création artistiques, monde économique et professionnel, langues et cultures de l’Antiquité, et les langues et cultures régionales et étrangères. Chaque année, deux thèmes devront être traités par les enseignants.
Les professeurs d’allemands et d’espagnols ont de quoi être inquiets puisque la deuxième langue vivante disparaîtra en 6e, elle ne sera pratiquée qu’à partir de la 5e tandis que l’anglais sera lui généralisé dès le CP. Cette nouveauté fait craindre des suppressions de postes ou des horaires en moins pour les professeurs de langues vivantes.
L’Option langues anciennes disparaît totalement, les langues anciennes seront toujours enseignées mais beaucoup moins puisqu’elles seront intégrées dans une discipline d’EPI appelée Langues et Cultures de l’Antiquité. Un apprentissage limité à un an puisque différents thèmes doivent d’être abordés chaque année.
Des postes devraient être créés pour la rentrée 2016 (2 500) et pour la rentrée 2017 (1700). Les programmes aussi changent, sur ce point il y a beaucoup de contestation de la part des parents et des enseignants notamment avec l’arrivée dans les programme d’histoire-géographie de l’enseignement de l’islam et du christianisme, un autre point de discorde concerne les périodes de notre histoire qui pourrait tomber dans l’oubli, en effet certains thèmes historiques seront obligatoires tandis que d’autres seront enseignés si le professeur le décide.
L’arrivée du livret scolaire numérique permettra aux parents de suivre directement les progrès de leurs enfants sur leur ordinateur. D’autres changements aussi du côté de la vie au collège avec des moments forts mis en avant : commémorations, journée de la laïcité, remise de diplôme (à l’américaine, avec les petits chapeaux ?) et spectacle de fin d’année.
Le point de vue du gouvernement
La ministre de l’Éducation, Najat Vallaud-Belkacem est partie d’un constat « Les évaluations nationales et internationales sont sans appel, le collège aggrave la difficulté scolaire ». Selon elle, se serait « Le Point noir de la scolarité »‘. Une opinion peut partagée par ceux qui arrivent au lycée et s’ennuient beaucoup plus en cours qu’auparavant, au collège. Toutefois, le gouvernement a souhaité réformer le collège alors pas le choix (49,3 où es-tu ?). D’après Café pédagogique, pour présenter sa réforme, la ministre a déclaré :
« Je veux que le collège permette à tous les élèves de mieux apprendre pour mieux réussir, en maîtrisant les savoirs fondamentaux et en développant les compétences du monde actuel ».
La ministre a répondu aux questions du Petit Journal et expliqué que cette réforme ne pénaliserait pas les enseignants, la disparition d’une deuxième langue vivante en 6ème permettrait que 100% des élèves de 5eme apprennent deux langues, pour la disparition des langues anciennes, elle répond que c’est « absolument faux », les classes de grec et de latin ne devraient pas disparaître.
Ce qu’en pensent les professeurs
En suivant un peu les forums des professeurs, le constat est évident, les nouveaux décrets à appliquer poseront de gros problème. L’exemple des professeurs documentalistes est aberrant, la circulaire n2015-057 leur interdit de faire des heures supplémentaires ce qui remet le CDI entre les mains du personnel administratif, non qualifié pour ce poste. De plus leur statut de professeur est remis en cause, ils n’en sont pas content du tout, ces professeurs de la documentation sont en ce moment même entrain de faire les démarches auprès des inspecteurs académiques pour éclaircir leur statut et leur fonction. De plus, il leur a été demandé d’assurer les cours d’AP (accompagnement personnalisé) mais le cadre d’enseignement n’est pas clair, les profs docs demandent à être mieux informés, c’est un comble !
De plus, les nouveaux emplois du temps qui doivent être en partie géré par l’établissement inquiètent les professeurs de toutes les matières, qui en plus de pas savoir ce qu’ils auront à enseigner devront revoir tous leurs cours à cause des changements dans les programmes scolaires eux-aussi très critiqués. Interrogés mardi par le Petit Journal pendant la manifestation qui s’est déroulée à Paris, les enseignants ont expliqué les raisons de la grève, les trois arguments qui reviennent le plus souvent sont : la suppression des classes bilangues, la disparition du latin et du grec (il n’y aurait même pas de programme) et la diminution des horaires plancher dans des disciplines comme le français ou d’autres matières existantes au profit des EPI.
Un autre point de discorde gouvernement-professeur concerne le remaniement du programme d’histoire, le christianisme ne serait pas obligatoire alors que l’islam oui, l’enseignement des lumières serait supprimé, Najat-Valaud Belkacem a répondu :
« Il faut permettre aux élèves d’avoir cet enseignement laïc du fait religieux alors toutes les religions sont présentes dans leurs cours d’histoire évidemment. »
Elle est restée plus vague en ce qui concerne l’enseignement des lumières, il y aurait eu des fautes dans le texte qui laisse la porte-ouverte à la confusion, selon la ministre, la période historique des lumières sera bien présente dans le programme d’histoire.
Le Point de vue des Parents
Sur le site ecolemania.fr, un espace d’expression pour les parents d’élèves, ils se questionnent : si les enseignants sont en grève, c’est qu’il y a une bonne raison ; pourquoi supprimer le latin ou le grec ? Classes interdisciplinaires, travail par petits groupes, oui ! Mais les enseignants seront-ils formés ?
Les parents d’élèves, attachés au système démocratique, reprochent au gouvernement de ne pas avoir tenu compte de leurs avis, leurs opinions pour cette réforme. Effectivement, cela fait déjà plus de dix ans qu’il n’y a pas eu de grand débat sur la réforme de l’enseignement qui est pourtant remise sur le tapis à chaque changement de présidence de la France. La grève des professeurs qui a commencé le 19 mai 2015 n’est pas terminée, des syndicats préparent déjà une autre manifestation pour faire bouger cette réforme incommodante et déstabilisante pour trop d’enseignants qui craignent pour leurs emplois.