La polémique s’est développée autour de la venue du rappeur Médine au Bataclan, dont les concerts sont prévus les 19 et 20 octobre prochains. La droite et l’extrême droite ont dénoncé des paroles controversées de certaines de ses chansons, datant de 2015.
[dropcap]C[/dropcap]e sont notamment les morceaux Jihad et Don’t Laïk qui ont fait polémique. Ce dernier était sorti en janvier 2015, une semaine avant les attentats contre Charlie Hebdo, et des paroles comme « crucifions les laïcards comme à Golgotha », « si j’applique la Charia les voleurs pourront plus faire de main courante » ou bien « j’mets des fatwas sur la tête des cons » ne sont évidemment pas passées inaperçues.
Les politiques multiplient les interventions
Cité par Le Monde, Laurent Wauquiez, président de LR, a tweeté « Au Bataclan, la barbarie islamiste a coûté la vie à 90 de nos compatriotes. Moins de trois ans plus tard, s’y produira un individu ayant chanté « crucifions les laïcards » et se présentant comme une « islamo-caillera ». Sacrilège pour les victimes, déshonneur pour la France ». Marine Le Pen, présidente du Rassemblement National, a été encore plus virulente. « Aucun Français ne peut accepter que ce type aille déverser ses saloperies sur le lieu même du carnage du Bataclan. La complaisance ou pire, l’incitation au fondamentalisme islamiste, ça suffit ! », a-t-elle déclaré, toujours sur Twitter. Même Aurore Bergé, la porte-parole des députés LREM, a dénoncé des « paroles [qui] sont, ni plus ni moins, un appel au meurtre ».
Les mises au point de Médine
Depuis cette époque, Médine Zaouiche (de son vrai nom), franco-algérien natif du Havre et âgé de 35 ans, semble avoir adopté des prises de positions plus modérées. Se définissant lui même comme musulman laïc, il a tout récemment fait une mise au point sur Facebook en précisant « Voilà 15 ans que je combats toutes formes de radicalisme dans mes albums », ou bien encore « je renouvelle mes condamnations passées à l’égard des abjects attentats du 13 novembre 2015 et de toutes les attaques terroristes ».
Médine a accusé lundi 11 juin l’extrême droite de vouloir « dicter la programmation de nos salles de concert » et « plus généralement limiter notre liberté d’expression ». Selon lui l’extrême droite, en protestant contre sa venue au Bataclan, cherche « à instrumentaliser la douleur des victimes et de leur famille ». Dans un communiqué cité par Le Point, il s’interroge « Allons-nous laisser l’extrême droite dicter la programmation de nos salles de concert, voire plus généralement limiter notre liberté d’expression ? »
La programmation des concerts maintenue
La direction du Bataclan a refusé toute demande d’entretien au Monde. En revanche Eric Bellamy, de la société Yuma Prod (spécialisée dans les concerts hip-hop), a réagi dimanche 10 juin :« Nous maintenons les concerts comme prévu. Médine s’est expliqué plusieurs fois sur le morceau Don’t laïk. Il n’y a aucune ambiguïté dans ce qu’il dit. Il a même écrit un texte magnifique sur le Bataclan auquel tout le monde a adhéré. »
Une avocate des victimes des attentats du 13-Novembre au Bataclan a demandé au préfet de police de Paris l’interdiction des concerts. Cependant Life for Paris, l’association de victimes du 13-Novembre, a adopté une attitude différente. L’association a en effet souligné que la salle « a aussi été victime des attentats et qu’elle est complètement libre de sa programmation, sous contrôle de la préfecture de police de Paris ».
Quant au porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, il a également souligné que « les salles sont libres de programmer qui elles veulent » et que « la liberté de l’artiste est totale sauf s’il y a incitation à la haine raciale, s’il y a trouble à l’ordre public et ça, c’est au droit de le dire », ajoutant que le rappeur « n’a pas été à ce stade condamné que je sache ». Pour le moment, la programmation des concerts des 19 et 20 octobre prochains est maintenue, ce dernier affichant déjà complet.