Lundi 17 décembre, le Haut-Commissaire à la retraite démissionne après plusieurs jours de controverse suite à des omissions dans sa déclaration d’intérêt à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) révélées par le Parisien dimanche 8 décembre.
Selon l’enquête du Parisien, Jean Paul Delevoye entretenait d’étroites relations avec le monde de l’assurance et notamment un Institut : l’Institut de formation de la profession de l’assurance, dont il était l’un des administrateurs bénévoles depuis 2016.
Seulement, ce mandat n’est pas présent dans sa déclaration d’intérêt à la HATVP.
En effet, selon le site de la HATVP, la déclaration d’intérêt et la déclaration de patrimoine sont demandées à plus de 15 000 responsables publics depuis les lois de 2013 relatives à la transparence de la vie publique. Cette déclaration d’intérêt doit contenir les activités professionnelles, les activités de consultant mais aussi les « fonctions bénévoles susceptibles de faire naitre un conflit d’intérêts » durant les cinq dernières années.
Entant qu’architecte de la réforme des retraites depuis deux ans, ces liens présentent évidemment un problème et un risque de conflit d’intérêts.
En plus de cette omission, l’ancien Haut-Commissaire a commis une autre faute en cumulant avec sa fonction publique une autre activité, celle de président d’honneur d’un think tank (c’est-à-dire un groupe de réflexion) qui se nomme Parallaxe. Cette activité n’était pas bénévole mais rémunérée alors que l’article 23 de la Constitution interdit « Tout emploi public ou toute activité professionnelle » aux membres du gouvernement pendant leur mandat selon le Monde.
Il a donc été contraint de revoir sa déclaration d’intérêt, reconnaissant lui-même des omissions. Mais cette nouvelle déclaration d’intérêt a révélé d’autres omissions dans sa déclaration initiale. Le monde a rendu publique sa nouvelle déclaration d’intérêt le samedi 14 décembre, dans laquelle il fait mention de 13 mandats, alors qu’il n’en avait déclaré que 3. Parmi ces mandats, nous pouvons trouver un poste au conseil d’administration de la fondation du Crédit agricole Nord de France, mais aussi ses postes au conseil d’administration de deux associations de Civic Tech, ou encore sa place au comité stratégique de la Fédération française des diabétiques.
Après plusieurs jours, le Haut-Commissaire a finalement décidé de démissionner de son poste, reconnaissant lui même fragiliser le projet qu’il portait depuis deux ans.
Cependant, qu’est-ce que sa démission change réellement ?
D’abord, c’est un échec pour l’exécutif qui perd l’artisan de la réforme des retraites. Ce dernier devait défendre le projet devant le Parlement au début de l’année 2020.
Cela pourrait aussi être un échec pour les acteurs sociaux qui reconnaissaient les compétences du Haut-Commissaire comme le dit Cyril Chabanier, président de la CFTC à nos confrères du Monde :« On perd quelqu’un de compétent, objectif, qui manifeste un grand respect pour les partenaires sociaux ».
Malgré cette déstabilisation, le gouvernement souhaite poursuivre leur travail en remplaçant Jean Paul Delevoye dans les plus brefs délais.
Cependant, cette démission ne semble rien changer pour les opposants à la réforme des retraites, les revendications restant les mêmes. Les différents syndicats opposés à la réforme, comme la FO ou la CGT, se sont exprimés hier à la suite de la démission du Haut Commissaire. Ils ont confirmé leur indifférence : le gouvernement n’a toujours pas reculé sur les paramètres problématiques, selon eux, du projet et c’est cela qui prime.
Si elle ne change rien concernant la réforme, cette démission pourrait néanmoins accentuer la colère généralisée contre le gouvernement et le Président de la République.